L’instantané subjectif d’Ed van der Elsken

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Ed van der Elsken

Ed van der Elsken (1925-1990) est considéré comme “l’enfant terrible” de la photographie hollandaise. S’il a beaucoup pratiqué la couleur à partir des années 1960, son œuvre reste essentiellement attachée à ses images en noir et blanc. Il était à la fois photographe et cinéaste, curieux de toutes les formes graphiques. S’il a beaucoup photographié sa vie intime, son terrain de prédilection était la rue, de jour comme de nuit. Véritable chasseur, il séduisait ses futures proies avec son Rolleiflex ou son Leica. Adepte de l’instantané, il mettait néanmoins souvent en scène ses rencontres. Son noir et blanc est iconoclaste et provocateur, par rapport à l’œuvre géométrique de Cartier-Bresson. Son premier livre, Love on the Left Bank (Une histoire d’amour à Saint-Germain-des-Prés, 1956) rompt avec les cadrages sages du reportage humaniste. Les tirages sont loin des dégradés de gris subtils et nuancés du fondateur de l’agence Magnum. Le tireur Philippe Salaün, qui a parfois travaillé pour lui, relate qu’il avait “une manière très particulière de tirer, brute, où l’on voit les traces de maquillage. C’était une sorte de contre-exemple du bon tirage soigné, qu’il avait érigé en système.” Sur l’image reproduite, “Territoires des yakusa, Kamagasaki, Osaka, 1960” les traces de maquillage au tirage sont évidentes et voulues. Le photographe transforme ces yakusa (gangsters japonais) comme s’ils étaient les acteurs d’un mauvais polar. Auteur d’une vingtaine de livres et d’une dizaine de films, Ed van der Elsken ouvre les portes au subjectif extrême.